Par la sueur de mon suaire...

Donc, de silence et de meurtrissures... De douleur et de quiétudes complices. Ainsi me viennent à l'esprit ces mots, ces phrases, après la lecture de Par la sueur de mon suaire, ce magnifique recueil de poèmes d'Esther Doko. En fait de textes, ce sont des expositions intérieures articulées dans des vers, de petits souffles éparpillés dans les mots. Esther Doko est une âme torturée. Sa candeur, qu'elle offre comme garantie à la compréhension du monde, a volé en éclats. Souffrance, une telle perte dans un univers qui pourtant lui offrait promesse de toutes les espérances. Aux blessures d'un quotidien âpre, en porte-à-faux avec les exigences minimales de la vie, s'ajoute le difficile commerce avec l'autre; l'autre soi-même, l'amoureux établi, si rassurant au départ, mais monstre d'égoïsme et d'effroi à l'arrivée. A lui tous les procès sont faits sans qu'à aucun moment, un verdict, une condamnation ne tombe. C'est que la poésie d'Esther Doko est une poésie de la retenue, de la discrétion, une poésie intimiste où les mots sont choisies avec autant de goût que de précision. On dirait qu'elle veut se confier en même temps qu'elle se retient. Comme si elle voulait rester entre le provisoire et le définitif, occasion de donner à la vie une nouvelle chance de se réconcilier avec elle. Par la sueur de mon suaire... n'est pas une exposition de la déchéance humaine, c'est un appel à la vie, à l'humanité, pour résister à la non-vie. J'ai aimé ces petits vers qui savent dire l'essentiel, j'ai aimé cette pudeur toute féminine qui se transforme en ellipse , j'ai croqué cette poétesse qui sait jongler avec les mots et leur donner la consistance du cadeau généreusement offert.