Parachute

« Elle lui avait donné rendez-vous chez Lapérouse. Sans être un habitué du célèbre restaurant du quai des Grands Augustins, Olivier avait déjà eu l’occasion d’apprécier ses petits salons privés où l’on peut discuter sans crainte d’être espionné par un voisin de table. Et Dieu sait qu’il n’avait aucune envie de croiser une connaissance ce soir… »
Olivier avait hésité jusqu’au dernier moment. Quand on a fait partie de la garde rapprochée d’Emmanuel Macron pour préparer le « casse du siècle » et qu’à peine un an plus tard on se retrouve élu député et porte-parole LaREM, on n’accepte pas sans arrière-pensées une invitation de Marion Maréchal. Chacun a évidemment un agenda caché.
Olivier découvre une jeune femme lucide, calculatrice, dotée d’une pensée complexe et d’une force d’attraction évidente. Un double d’Emmanuel. Il se promet de livrer à son mentor en politique des informations de première main sur une future adversaire.
Les rencontres se succèdent, espacées dans le temps mais jamais interrompues, sauf lors de la pandémie. Il se dit progressiste, elle se revendique conservatrice. Lui apprécie le très bon whisky, elle les cocktails. Tous deux aiment l’intimité des bars. En politique, un seul commandement : « tu haïras ton prochain comme toi-même ». Pourtant, quand l’esprit reste ouvert, tel un parachute, l’impensable peut se produire.
Imperceptiblement, un trouble s’installe. Quel rôle joue Olivier, infiltré ou complice ? Qui manipule qui ?

Ce huis-clos soigneusement préservé par les deux principaux protagonistes, offrent des échanges à fleurets mouchetés. Ils dévoilent des interrogations, des convictions, des choix constituant des matrices possibles, une ébauche, d’un roman national inachevé. L’auteur porte à un point d’incandescence cet art très français de la conversation qui constitue l’âme d’une nation littéraire et politique. Comme dans un processus de diffraction, les thèmes surgissent, disparaissent puis rejaillissent, le sens se dévoile au gré des cabrioles d’une dialectique aventureuse.
Dans cette uchronie de Gérard-Noël Hesse, tout relève de la fiction mais étrangement rien ne semble faux. Ou serait-ce le contraire ?